A la Porte d'Apollon

Une chronique grecque, 1980-2015

Desenchante36



Le Carnaval des fous


Comme une prémonition, l'effigie aux allures de Thanatos parcourt les rues au son des sifflets et des tambourins, virevolte au-dessus de la foule masquée qui défile. Dans quelques heures, elle finira par brûler, comme Icare, au pied de la Portara.

En cet hiver 2009, c'est Apokries en Grèce. La crise est déjà là, le cancer ronge, mais on ne le sait pas encore. Dans les villages, à Patras, à Athènes, on fait la fête, on danse, on mange et re-mange, on boit. Les lendemains qui déchantent seront pour « αύριο*».

Au-dessus de la mer, en ce Lundi Pur avant Carême, les cerfs-volants emportent avec eux les derniers moments d'insouciance.

« No Greece »


Février 2012. Les panneaux apposés sur les vitres des comptoirs des ferries, dans les ports italiens, annoncent la couleur  : « No Greece ». La tempête hivernale et les grèves ont eu raison du trafic maritime. Manifestation après manifestation, Athènes s'est enflammée. Si la violence fait partie des tragédies grecques, la pièce qui se joue ne déroge pas à la règle.

J'ai décidé de photographier le décor, l'envers et les à-côtés de la scène. A quoi bon montrer les événements, les télévisions s'en chargent et d'ailleurs, je ne suis ni au bon endroit, ni au bon moment.

La crise suinte partout, sur les murs graffités, aux pas des portes qui servent d'abris aux sans-logis, dans l'adieu des amants sur le quai de la gare. Quand je quitte la Grèce cet hiver 2012, je sais qu'une page se tourne. Le « oxi », le « non » va avoir de beaux jours devant lui.



*demain